Avocat collectivités publiques : La parution du guide de la mutualisation

Paru le 5 mai dernier, « La mutualisation au service des communes, des intercommunalités et de leurs établissements » est le résultat d’un travail de concertation codirigé entre le Ministère de la Décentralisation et de la Fonction Publique et l’Association des Maires de France.

Pour faire face à la réduction des dotations de l’Etat et répondre à la demande croissante de services locaux la rationalisation des moyens apparaît comme le moyen efficient pour les collectivités locales.

Un travail pragmatique est proposé, synthétisé sous forme de fiches destinées à accompagner les collectivités dans leurs réflexions sur les compétences exercées et sur l’organisation mise en place qu’incite le schéma de mutualisation.

 

LA MUTUALISATION

  1. Avec qui ? de quoi ?comment ?
  2. Un choix politique qui requiert un pilotage dédié
  3. Une exigence de proximité, de réactivité et de cohérence de l’action
  4. Une mobilisation des ressources humaines
  5. Un schéma au service du projet de territoire
  6. On y gagne quoi ?

IDENTIFIER LES OBJETS DE MUTUALISATION

  1. Les achats
  2. Les systèmes d’information
  3. L’accompagnement scolaire-enfance-jeunesse
  4. La voirie et l’aménagement de l’espace public

 

Avant la fin de l’année 2015, les communes et leurs intercommunalités devront initier leur schéma de mutualisation des services. Prévus par la loi de réforme des collectivités territoriales du 16 décembre 2010[1], ces schémas visent une meilleure organisation des services dans les conditions fixées à l’article L 5211-39-1 du Code général des collectivités territoriales. Dans l'année qui suit chaque renouvellement général des conseils municipaux, le président de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (ci-après EPCI) établit un rapport relatif aux mutualisations de services entre les services de l’EPCI et ceux des communes membres. Ce rapport comporte un projet de schéma de mutualisation des services à mettre en œuvre pendant la durée du mandat. Ce projet comprend notamment la présentation de l'impact prévisionnel de la mutualisation sur les effectifs de l'EPCI et des communes concernées et sur leurs dépenses de fonctionnement.

L’objectif de la réforme aura été de moderniser le fonctionnement et l’organisation de l’intercommunalité en France. L’influence de la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne dans ce projet de réforme est indéniable.

La parution de ce guide donne l’occasion de faire un point sur la technique de gestion de l’activité publique qu’est la mutualisation.

 

L’EVOLUTION DES PROCEDES DE MUTUALISATION

La mutualisation est le fruit d’une volonté politique dont l’objectif concourt à la « mise en place, temporaire ou pérenne, d’une logistique commune à deux ou plusieurs personnes morales »[2]. Chaque collectivité prenante conserve les moyens qui sont les siens. Il s’agit d’un « partage » de ressources entre des décideurs distincts. La mise en commun de leurs biens et/ou services se fait soit par la création d’une entité ad hoc prenant la forme d’un organisme public de coopération soit par la conclusion d’un contrat. Selon qu’elle est institutionnelle ou conventionnelle, la mutualisation est qualifiée de verticale[3] ou d’horizontale[4].

Le mécanisme a l’occasion de s’exercer dans des domaines variés : ressources humaines, financières, mutualisation des structures, des locaux ou des réseaux – notamment informatiques, mutualisation des fichiers, expertises, des connaissances et des savoir-faire...

La mise en œuvre des moyens peut résulter de divers procédés : prêt de moyens, fusion, regroupement, absorption, mise en commun ou partage d'outils et de moyens, mise en place de synergies, d'interopérabilités ou d'interdépendance entre services.

Cet outil d’organisation des services des collectivités locales trouve un cadre privilégié au niveau intercommunal.

Les notions d’intercommunalité et de mutualisation sont intrinsèques[5]. L’un des objectifs de l’intercommunalité est de permettre aux collectivités territoriales d’organiser de façon rationnelle et efficace les compétences qu’elles détiennent dans les divers domaines de l’action locale. L’intercommunalité suppose un transfert de compétence au profit d’un établissement public de coopération (EPCI), qui peut prendre la forme de syndicats de communes, de communautés de communes, de communautés urbaines, de communautés d'agglomération, de syndicats d'agglomération nouvelle ou bien encore de métropoles[6].

Conformément à l’article L.5211-4-1.I du Code général des collectivités territoriales[7], le transfert de compétence d’une commune à un EPCI implique obligatoirement le transfert simultané du service ou de la partie de service pour lequel il est chargé de la mise en œuvre.

Afin de formaliser les modalités concrètes de ce type de coopération, le législateur a fixé le cadre des conventions que les structures intercommunales et les collectivités adhérentes peuvent passer entre elles.

D’après ce dispositif, les collectivités territoriales peuvent recourir à l’EPCI auquel elles adhèrent :

  • soit par la conclusion de marchés publics de services (c’est le cas des conventions conclues pour la création ou la gestion de certains équipements ou services relevant des attributions de l’EPCI dont traitent les articles L.5214-16-1, L.5215-27 et L.5216-7-1 du CCGT);

 

  • soit par la conclusion de conventions de mise à disposition visées aux articles L.5211-4-1.II et L.5721-9 du Code.

Dans ce second cas, le législateur consacre clairement la mutualisation entre EPCI et les communes membres.

Si pour la première série de contrats envisagés, la soumission au droit de la commande publique ne fait pas de doute, la question mérite en revanche d’être posée concernant les contrats de mise à disposition. C’est à ce niveau qu’il convient également de savoir si l’EPCI peut s’analyser comme un opérateur in house.

 

A - Le mécanisme conventionnel de mutualisation des services entre les EPCI et les communes membres : les conventions de mise à disposition

L’article L.5211-4-1 du CGCT autorise les EPCI à mettre à disposition d’une ou plusieurs de ses communes membres tout ou partie de leurs services pour l'exercice de leurs compétences lorsque cette mise à disposition présente un intérêt « dans le cadre d'une bonne organisation des services ». Le schéma inverse est également admis depuis l’adoption de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, pour les services qu’une commune souhaiterait mettre à la disposition d’un EPCI[8].

Dans les deux hypothèses, la convention passée entre l’organisme de coopération et chaque commune intéressée fixe les modalités et prévoit les conditions de remboursement des frais de fonctionnement du service dus par la commune ou l'organisme bénéficiaire de la mise à disposition.

1- La nature juridique des conventions de mise à disposition de services

Tel qu’il résulte des dispositions du Code général des collectivités territoriales, ces conventions se distinguent nettement des marchés publics de services en raison de leur objet. Elles ont vocation, non pas à fournir une prestation de service mais de permettre aux collectivités territoriales et à leurs groupements, de partager leurs moyens afin de faciliter l’exercice de leurs compétences. Dans ce contexte, la collectivité publique ne cherche pas à répondre à un besoin spécifique mais traduit une volonté d’élaborer un projet qu’elle aurait en commun avec d’autres collectivités ou groupements, en vue d’accomplir ou d’améliorer l’exercice des tâches qui lui incombe.

Les structures intercommunales peuvent ainsi créer des services ou des parties de services qui sont économiquement et fonctionnellement nécessaires à la mise en œuvre de compétences conjointes. Dès lors, l’EPCI ou la commune qui met à disposition ses services ne doit pas être regardé comme un prestataire de service. Également, il est spécifiquement précisé à l’article L.5211-4-1 du CGCT que ces conventions ont pour finalité la bonne organisation des services relevant des attributions de la commune membre ou de l’EPCI suivant les compétences qui lui ont été transférées.

Néanmoins, la qualification ainsi adoptée ne s’impose pas d’elle-même car ces contrats répondent aussi aux critères du marché public. D’une part, la mise à disposition d’un service administratif ou technique peut tout aussi bien constituer une prestation de services ou de travaux[9]. D’autre part, le remboursement soit de la commune soit de l’EPCI, des frais de fonctionnement du service mis à disposition, est susceptible de traduire le caractère onéreux de la convention. Enfin, qu’il s’agisse de la mise à disposition des services de la commune ou de l’EPCI, dans les deux cas, l’une ou l’autre agit dans l’intérêt du bénéficiaire de ses services.

A ce propos, la question de savoir si ces conventions devaient ou non faire l’objet d’une mise en concurrence préalable à leur conclusion s’est clairement posée durant les discussions parlementaires menées pour l’adoption du projet de loi relative aux libertés et responsabilités locales[10].

En réponse, le ministre délégué à l'intérieur et porte-parole du Gouvernement, M. J-F. Copé, a fermement dit que « les conventions passées entre un EPCI et ses communes membres en vue de l'organisation conjointe de leurs services ne relèvent pas du droit de la commande publique ». Une circulaire du 15 septembre 2004[11] confirmera cette exemption ; « Ces conventions qui traduisent l’organisation interne des collectivités locales, n’entrent pas dans le champ de la concurrence. Ces conventions ne sont donc pas soumises aux règles de publicité et de mise en concurrence afférentes aux marchés publics.».

Pour autant, suffit-il de prévoir dans un texte que la convention est conclue parce qu’elle présente un intérêt dans le cadre d’une bonne organisation des services pour la faire échapper au droit de la « commande publique » ?

Il importe de replacer le débat, dans le contexte de l’évolution du droit de l’Union introduite depuis la jurisprudence « Teckal »[12]. La justification de l’exclusion des règles de mise en concurrence semble envisageable sur le fondement de la théorie des prestations intégrées, cependant, est-elle transposable pour chacune des deux hypothèses envisagées par le Code général des collectivités territoriales ?

 

2- Les systèmes de mutualisation

Suivant les dispositions de l’article L.5211-4-1 du CGCT, deux modes de mutualisation sont distinguées.

La mise à disposition collective peut être soit « descendante », lorsque ce sont les services de l’EPCI qui sont mis à la disposition des communes membres, soit « ascendante » lorsqu’à l’inverse, ce sont les services d’une commune membre qui sont en tout ou partie, mis à la disposition d’un EPCI pour l’exercice de ses compétences.

La réversibilité de la mise à disposition entre l’EPCI et ses communes membres est un moyen de réduire les dépenses publiques en permettant des économies d’échelle et d’éviter que les mêmes services soient inutilement créés dans chaque structure[13]. Une telle réorganisation est principalement motivée par la recherche d’une meilleure qualité et efficacité des services.

Dans le cas de mutualisations « descendantes » au sein d’une intercommunalité, le Code général des collectivités territoriales prévoit deux possibilités ;

  • la mutualisation consistant en une simple mise à disposition
  • la mutualisation dans le cadre d’une « gestion unifiée »

Cette dernière hypothèse recouvre deux cas de figures définies aux articles L.5211-4-2 et L. 5211-4-3 du CGCT qu’il convient de différencier[14] :

  • Le premier prévoit que sous couvert d’une convention, un EPCI à fiscalité propre et une ou plusieurs de ses communes membres peuvent se doter de services communs et ce y compris pour l’exercice par les communes de compétences qui n’ont pas été transférées à l’EPCI

 

  • Le second envisage que pour permettre une mise en commun de moyens, « un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut se doter de biens qu'il partage avec ses communes membres selon des modalités prévues par un règlement de mise à disposition, y compris pour l'exercice par les communes de compétences qui n'ont pas été transférées antérieurement à l'établissement public de coopération intercommunale ».

 

Seules les conventions de mise à disposition seront traitées dans le cadre de la présente étude.

Sur le sujet, la Cour de Justice de l’Union européenne a ouvert des perspectives intéressantes. Par les jurisprudences « Coditel Brabant » du 13 novembre 2008, et « Commission c/ République Fédérale d’Allemagne » du 9 juin 2009, la Cour de Justice a estimé qu’une commune peut attribuer, « sans appel à la concurrence, une concession de services publics à une société coopérative intercommunale dont tous les affiliés sont des autorités publiques, dès lors que ces autorités publiques exercent sur cette société un contrôle analogue à celui qu’elles exercent sur leurs propres services et que ladite société réalise l’essentiel de son activité avec ces autorités publiques »[15] et d’autre part, « qu’une autorité publique peut accomplir les tâches d’intérêt public qui lui incombent par ses propres moyens, sans être obligée de faire appel à des entités externes n’appartenant pas à ses services, et qu’elle peut aussi le faire en collaboration avec d’autres autorités publiques »[16].

Partant de ces solutions, la création d’un organisme, en l’occurrence un EPCI dont l’activité consiste à exercer des compétences à la place de ses membres[17] et aux décisions duquel participent les communes par l’intermédiaire de leurs représentants[18], répond principe de libre administration des collectivités territoriales de définir et d’organiser elles-mêmes leurs structures administratives internes[19]. Au regard de ces circonstances, l’EPCI est assimilé aux services des collectivités qui le détiennent. Il en résulte que les services accomplit par l’EPCI au bénéfice de ses membres sont des prestations quasi-intégrée[20].

Si l’exception in house, est pleinement admise pour les conventions de mutualisation « descendante », pareille solution n’est pas pour autant transposable aux conventions de mutualisation « ascendante », c'est-à-dire, de la mise à disposition des services de la commune membre au bénéfice de l’EPCI. A ce propos, la Commission européenne par un avis motivé en date du 27 juin 2007[21] avait fait connaître à la France que de telles conventions prévoyant « la mise à disposition des services d’une collectivité territoriale au bénéfice de l’établissement de coopération auquel elle adhère » doivent être soumises aux règles de mise en concurrence.

 

B - La nécessaire sécurisation juridique des conventions de mutualisation « ascendante »

En reconnaissant la possibilité aux collectivités territoriales de mettre à disposition leurs services à l’EPCI auquel elles participent, la loi de 2004 leur offrait le choix soit de transférer certains de leurs services à l’EPCI dont elles sont membres, soit, au contraire, de les conserver et de les mettre ultérieurement à disposition de ce dernier pour l’exercice de ses compétences et ce en dehors des règles de la commande publique. Ces conventions ont fait l’objet d’une attention particulière de la part de la Commission européenne qui a demandé aux autorités françaises des précisions quant à leur nature juridique. En réaction, le Gouvernement engagé dans le grand projet de réforme des collectivités territoriales s’est chargé de clarifier la réglementation en vigueur.

 

1- Le particularisme des conventions de mutualisation « ascendante » remis en cause par la Commission européenne ?

Dans le cadre de procédure d’infraction prévue à l’article 226 du Traité CE (devenu article 258TFUE), la Commission a exigé de la France, la correction de certaines dispositions de sa réglementation contraires au droit de l’Union. Elle a estimé que le mécanisme de mutualisation « ascendante » des services « revient à attribuer de gré à gré un marché public aux services communaux ou aux services de la collectivité territoriale sans respecter les procédures de passation prévues par le droit communautaire des marchés publics et, en particulier, par les directives "marchés publics" 2004/18/CE et 2004/17/CE. »[22].

Dans une réponse à une question parlementaire, le Ministère de l’Intérieur réaffirme la position constante des autorités nationales sur la nature des conventions de mise à disposition d’une commune vers l’EPCI consistant à les admettre comme « un mode d’organisation interne de l’administration locale destinée à optimiser la mise en œuvre des transferts de compétences au profit des organismes de coopération locale »[23]. Les services ministériels soulignent également que dans sa réponse officielle à l’avis motivé de la Commission, le Gouvernement souhaite maintenir cette position et précise que « la remise en cause de ce mécanisme affecterait profondément l’équilibre institutionnel de l’intercommunalité en France et, partant, l’un des axes majeurs de la politique d’organisation et d’aménagement du territoire depuis trois décennies.». De cet argument fort, il doit en résulter que ces conventions de mise à disposition participent au droit reconnu aux collectivités territoriales à pouvoir s’organiser librement, droit garanti par l’article 72 de la Constitution.

Au surplus, toute une série d’arguments vient appuyer cette approche :

En premier lieu, suivant la lecture de l’article L.5211-4-1 du CGCT, le recours à la mise à disposition est admis à condition qu’il présente un intérêt « dans le cadre d’une bonne organisation des services».

En deuxième lieu, il sera relevé la contradiction qui est de nature à faire échec à la qualification des conventions de mutualisation « ascendante » en marchés publics. En effet, la collectivité qui met à disposition ses services au bénéfice de la structure intercommunale est également membre de celle-ci. Aussi, si la collectivité fait le choix d’adhérer à l’intercommunalité, c’est soit pour parvenir à assurer avec d’autres des services qu’elle n’a pas la possibilité d’assurer seule soit pour améliorer ses services existants.

Au demeurant, le fait de qualifier la mise à disposition des services de la commune à l’établissement de coopération auquel elle adhère en une prestation de service au sens de la définition d’un marché public, revient également à admettre qu’elle réalise une prestation pour elle-même. En outre, il est difficile de voir comment les règles de concurrence pourraient trouver à s’appliquer dans la mesure où seules les collectivités adhérentes peuvent fournir les services dont a besoin l’établissement au sein duquel elles coopèrent afin que ce dernier puisse exercer les compétences qui lui ont été transférées.

En conclusion et de manière générale, les conventions de mutualisation « ascendantes » ou « descendantes » sont des conventions d’organisation interne exclues du champ d’application des règles de commande publique.

Néanmoins, c’est dans ce contexte d’incertitude juridique que la loi de réforme des collectivités territoriales est venue modifier les dispositions visées par le Code général des collectivités territoriales.

 

2- La mise en conformité de la réglementation sur les conventions de mutualisation dans le contexte de la récente réforme des collectivités territoriales

L’adoption le 16 décembre 2010 du projet de loi portant sur la réforme des collectivités territoriales, a pour mérite de venir clarifier le dispositif applicable. L’amélioration et le renforcement de l’intercommunalité étaient comptés parmi les points phares de la réforme[24].

Ce nouveau dispositif vient sécuriser au regard du droit de l’Union la pratique de la mutualisation « ascendante » en précisant les conditions dans lesquelles interviennent les conventions entre l’EPCI et les communes[25]. Il résulte d’une lecture combinée du I al. 1er, et II de l’article L.5211-4-1 du CGCT que les mises à disposition par les communes de leurs services ne peuvent désormais se réaliser uniquement dans le cas où « dans le cadre d'une bonne organisation des services », ces collectivités ont dû conserver « tout ou partie du service concerné par le transfert de compétences, à raison du caractère partiel de ce dernier ». Par conséquent, le transfert de compétences des communes à l’établissement de coopération qu’elles ont créé est posé en tant que principe. La mise à disposition des services d’une collectivité à l’EPCI ne s’envisage alors plus comme solution alternative mais comme une dérogation.

Bien qu’il soit difficile à court terme d’en mesurer ses effets, il semble qu’une telle disposition est de nature à réduire les hypothèses de mutualisation « ascendante ».

Dans le prolongement de ces aménagements législatifs, un décret du 10 mai 2011[26]précise le calcul des modalités de remboursement des frais de fonctionnement des services mis à disposition.

Il résulte du dispositif que peu importe le type de mutualisation en cause, les coûts engendrés par la mise à disposition doit strictement correspondre au frais de fonctionnement nécessairement lié au service. Partant de ces considérations, la convention en cause ne saurait représenter un marché public de services lequel suppose l’onérosité de la prestation réalisée. La situation est donc semblable à celle de la mutualisation « descendante », à savoir que sous réserve du respect de la double condition posée au terme de la nouvelle rédaction de l’article L.5211-4-1 du CGCT, la mise à disposition des services de la collectivité doit être regardée comme un mode d’organisation interne de la personne publique qui ne donne pas lieu à l’application des règles de la commande publique.

En outre, le législateur autorise désormais l’EPCI et une ou plusieurs de ses communes membres à créer des services communs y compris pour l’exercice de compétences qui n’auraient pas été transférées à l’EPCI et ce dans le cadre de conventions non soumises au droit de la commande publique.

Egalement, la réforme des collectivités territoriales aura permis de consacrer la possibilité d’une mutualisation « horizontale » qui ouvre la faculté pour les collectivités et leurs groupements, de prendre des initiatives de mutualisation sans recourir à la création d’un organisme ad hoc[27].

Ces conventions de mutualisation échappent au droit de la concurrence, au motif d’être convenues uniquement entre personnes publiques et d’être exclusivement destinées à assurer la mise en œuvre d’une mission de service public qui est commune à ces dernières. Le législateur a opéré la traduction française, de la jurisprudence de la Cour, « Commission c/ République Fédérale d’Allemagne » du 9 juin 2009. Or, seuls sont autorisées à contracter entre eux ; les départements, les régions, leurs établissements publics, leurs groupements et les syndicats mixtes. Les communes en sont exclues. Conformément à l’article L. 5111-1-1 du CGCT ; « Lorsqu'elles ont pour objet d'assurer l'exercice en commun d'une compétence reconnue par la loi ou transférée à leurs signataires, (ces conventions) prévoient : - soit la mise à disposition du service et des équipements d'un des cocontractants à la convention au profit d'un autre de ces cocontractants ; - soit le regroupement des services et équipements existants de chaque cocontractant à la convention au sein d'un service unifié relevant d'un seul de ces cocontractants ». La liberté d’organisation des communes est en ce sens limitée. L’absence de base législative conduit à subordonner systématiquement les mutualisations conventionnelles entre communes à la création d’une structure ad hoc.

 

Sonia GHERZOULI, Juriste, Société d’Avocats Legitima

 

[1] L. n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales

[2] Sénat, Rapp. d’information n°495 (2009- 2010), sur la mutualisation des moyens des collectivités territoriales, de LAMBERT A., DETRAIGNE Y., MEZARD J. et SIDO B., fait au nom de la Délégation aux collectivités territoriales, déposé le 25 mai 2010

[3] Sénat, Rapp. d’information n°495, « La mutualisation des moyens des collectivités territoriales » ; op.cit : v. glossaire.

Mutualisation entre une collectivité et un établissement auquel elle est partie prenante (l’un de ses établissements publics sans fiscalité propre, l’EPCI dont elle est membre…)

[4] Sénat, Rapp. d’information n°495, « La mutualisation des moyens des collectivités territoriales » ; op.cit : v. glossaire.

Mutualisation entre collectivités indépendantes les unes des autres (ex. entre deux communes, ou entre une commune et un département)

[5] Sénat, Rapp. d’information n°495, « La mutualisation des moyens des collectivités territoriales » ; op.cit., spéc. p.34 s.

[6] Art. L.5210-1-1-A CGCT

[7] Crée par l’article 46 de la loi relative à la démocratie locale. L. n° 2002-276, 27 fév. 2002 relative à la démocratie de proximité, NOR: INTX0100065L, JO 28 fév. 2002 p. 3808

[8] Par la loi L. n° 2004-809, 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, NOR: INTX0300078L, JO 17 août 2004, p.14545.

Le même dispositif est prévu par l’article L.5721-9 CGCT pour les syndicats mixtes « fermés ».

[9] Des services intercommunaux peuvent intervenir dans des domaines concurrentiels notamment lorsqu’ils contribuent au montage de projets ou à la réalisation de travaux ou d’ouvrages publics.

[10] Sénat 2ème lecture du projet de loi relative aux libertés et responsabilités locales, séance du 1er juill. 2004 ; spéc. art. 113.

[11] Circ., NOR/LBL/B/04/10075/C, 15 sept. 2004 relative aux nouvelles dispositions concernant l'intercommunalité introduites par la loi « libertés et responsabilités locales ».

[12] CJCE, 18 nov. 1999, aff. C-107/98, Teckal SRL, concl. COSMAS: Rec. CJCE, p. I-8121, pt. 49 à51;

Exception à l’application du droit de la concurrence sur le fondement de la théorie du contrat in house « Il ne peut en aller autrement que dans l'hypothèse où, à la fois, la collectivité territoriale exerce sur la personne en cause un contrôle analogue à celui qu'elle exerce sur ses propres services et où cette personne réalise l'essentiel de son activité avec la ou les collectivités qui la détiennent. »

[13] V. en ce sens le projet de loi relatif aux responsabilités locales, n° 4 (2003-2004), déposé le 1er oct. 2003

[14] Antérieurement à l’adoption de la loi de réforme des collectivités territoriales (L. n° 2010-1563, 16 déc. 2010 de réforme des collectivités territoriales, NOR: IOCX0922788L, JO 17 déc. 2010, p. 22146) ce dispositif était prévu au 5ème alinéa du II de l’article L.5211-4-1 CGCT selon lequel « Un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut également, dans le cadre d'une gestion unifiée du personnel de l'établissement public et de celle des communes membres qui en ont exprimé le souhait, et dans les conditions fixées par le conseil de communauté, mettre son personnel et ses services à la disposition des communes qui en font la demande. »

La loi est venue clarifier la finalité et les modalités de cette pratique et autorise explicitement la création de services communs entre l'EPCI et une ou plusieurs de ses communes membres, y compris pour l'exercice par les communes de compétences qui n'ont pas été transférées à l'EPCI. Les services concernés sont généralement des services fonctionnels : ressources humaines, informatique, service des marchés, bureau d'études, services d'analyse et de gestion financière, etc.

[15] CJCE, 13 nov. 2008, aff. C- 324/07, Coditel Brabant SA c/ Cne d’Uccle et Région de Bruxelles-Capitale, concl. TRSTENJAK ; spéc. pt.42.

[16] CJCE, 9 juin 2009, aff. C-480/06, Commission des Communautés européennes c/ République fédérale d'Allemagne, concl. MAZAK ; spéc. pt.45.

[17] Art. L.5211-4-1.I CGCT ; « Le transfert de compétences d'une commune à un établissement public de coopération intercommunale entraîne le transfert du service ou de la partie de service chargé de sa mise en oeuvre. Toutefois, dans le cadre d'une bonne organisation des services, une commune peut conserver tout ou partie du service concerné par le transfert de compétences, à raison du caractère partiel de ce dernier. »

[18] Art. L5211-6 CGCT ; « L'établissement public de coopération intercommunale est administré par un organe délibérant composé de délégués élus par les conseils municipaux des communes membres.»

[19] Art. L5111-1CGCT ; « Les collectivités territoriales peuvent s'associer pour l'exercice de leurs compétences en créant des organismes publics de coopération dans les formes et conditions prévues par la législation en vigueur »

[20] En ce sens DREYFUS J-D., « Mutualisation des services et mise en concurrence ; autour des notions de bonne organisation et de prestation hors marché », AJDA 2007, p.1865.- BOURREL A., « L’intercommunalité à l’abri du droit des marchés publics: une application audacieuse de la notion de « in house » », AJDA 2009, p.929

[21] Comm. Eur., avis, 27 juin 2007 ; communiqué IP/07/922

[22] Ibid

[23] Rép.min. n°3682, JOAN 4 déc. 2007, p.7700.

[24] Sénat, Rapp. n°169 (2009-2010) sur le projet de loi de réforme des collectivités territoriales, de J-P. COURTOIS fait au nom de la Commission des lois, enregistré le 16 déc. 2009.

[25] Art. 65 et 66 L. n° 2010-1563.

[26] D. n° 2011-515, 10 mai 2011, relatif au calcul des modalités de remboursement des frais de fonctionnement des services mis à disposition dans le cadre de l'article L. 5211-4-1 du code général des collectivités territoriales ; NOR: COTB1110402D : JO 12 mai 2011, p. 8237.

[27] Art. L. 5111-1-1 CGCT- L.n°2010- 1563, art. 68.

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