Étrangers, 17 avril 2015, n°372195: 1) Il ressort des termes mêmes des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux.
2) La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.
Responsabilité de la puissance publique, 29 avril 2015, n°369473 : Lorsque les conséquences de l'acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l'absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible. Ainsi, elles ne peuvent être regardées comme anormales au regard de l'état du patient lorsque la gravité de cet état a conduit à pratiquer un acte comportant des risques élevés dont la réalisation est à l'origine du dommage.
Élections et référendum, 29 avril 2015, n°382923 : Entrent dans le champ des dispositions du 8° de l' article L. 231 du code électoral, qui sont d'interprétation stricte, d'une part, les établissements publics dépendant exclusivement d'une région ou d'un département, ainsi que des autres collectivités territoriales et établissements mentionnés par ces dispositions, d'autre part, ceux qui sont communs à plusieurs de ces collectivités. Doivent être seulement regardés comme dépendant de ces collectivités ou établissements ou comme communs à plusieurs collectivités, pour l'application de ces dispositions, les établissements publics créés par ces seuls collectivités ou établissements ou à leur demande.
Contentieux administratif, 6 mai 2015, n°375036 : La demande adressée à un amicus curiae (article R. 625-3 du code de justice administrative) peut prendre la forme d'un courrier du président de la formation chargée d'instruire l'affaire comme d'une décision juridictionnelle. Cette demande ne peut porter que sur des observations d'ordre général sur les points déterminés par la formation de jugement, lesquels peuvent être des questions de droit, à l'exclusion de toute analyse ou appréciation de pièces du dossier. Toutefois, lorsque l'avis a été demandé ou rendu en méconnaissance de ces principes, le juge n'entache pas sa décision d'irrégularité s'il se borne à prendre en compte les observations d'ordre général, juridiques ou factuelles, qu'il contient. 2) Un moyen tiré de ce que le juge du fond a méconnu l'article R. 625-3 du code de justice administrative peut être soulevé en cassation alors même que le requérant aurait pu le soulever en cours d'instance devant le juge du fond.
Contentieux administratif, 11 mai 2015, n°379356 : L'application informatique dédiée accessible par le réseau internet mentionnée à l'article R. 414-1 du code de justice administrative (Télérecours) permet à toute partie ou tout mandataire inscrit de consulter les communications et notifications relatives aux requêtes qu'il a introduites, quelle que soit la forme sous laquelle il les a introduites et quelle que soit la date à laquelle il s'est inscrit dans l'application. Ainsi, la circonstance qu'une requête ait été introduite sous une forme non dématérialisée ne fait pas obstacle à ce que, à tout moment de la procédure, soient adressées sous forme dématérialisée, dans le cadre de cette application, des communications et notifications relatives à cette procédure à toute partie ou tout mandataire inscrit. 2) L'envoi d'un message électronique aux parties et à leurs mandataires, en l'absence de demande contraire de leur part, n'est prévue par les dispositions de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative (CJA) qu'à titre d'information et est sans incidence sur les conditions dans lesquelles les communications et notifications sont réputées reçues, conformément aux dispositions du même article et, lorsque le litige est porté devant le juge des référés statuant en urgence, à celles de l'article R. 522-10-1 du même code. La circonstance qu'un tel message n'aurait pas été reçu est ainsi sans incidence sur la régularité de la procédure.
Informatique et libertés, 11 mai 2015, n°375669 : Limitation des autorités susceptibles de mettre en œuvre des traitements de données à caractère personnel relatives aux infractions, condamnations et mesures de sûreté par l'article 9 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 1) Doivent être regardées comme entrant dans le champ d'application de cet article, non seulement les données relatives aux infractions, condamnations ou mesures de sûreté elles-mêmes, mais également les données qui, en raison des finalités du traitement automatisé, ne sont collectées que dans le but d'établir l'existence ou de prévenir la commission d'infractions, y compris par des tiers. 2) En revanche, ces dispositions ne font pas obstacle à la mise en œuvre de traitements de données à caractère personnel relatives à des infractions par les personnes qui en ont été victimes ou sont susceptibles de l'être.
Contentieux administratif, 27 mai 2015, n°388705 : 1) Un syndicat défendant les intérêts collectifs des magistrats judiciaires, dont l'objet est régi par les dispositions de l'article L. 2131-1 du code du travail applicables aux syndicats professionnels, ne saurait utilement se prévaloir des termes généraux de ses statuts relatifs à la défense des libertés et des principes démocratiques pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation d'un acte administratif susceptible, selon lui, de porter atteinte aux libertés et principes démocratiques. 2) L'intérêt pour agir s'appréciant au regard des conclusions présentées par le requérant et non des moyens invoqués à leur soutien, ce même syndicat ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de dispositions relatives à la mise en œuvre, par les autorités administratives, de la mesure d'interdiction de sortie du territoire, qui ne sont pas de nature à affecter les conditions d'emploi et de travail des magistrats judiciaires dont il défend les intérêts collectifs et ne portent par elles-mêmes aucune atteinte à leurs droits et prérogatives. Est sans incidence à cet égard la circonstance que le requérant entend se prévaloir, à l'encontre des dispositions attaquées, par la voie d'une question prioritaire de constitutionnalité, de ce que les dispositions législatives qui sont la base légale des dispositions litigieuses méconnaîtraient, selon lui, le rôle dévolu à l'autorité judiciaire par la Constitution.
Nature et environnement, 29 mai 2015, n°381560 : 1) Lorsque le juge administratif annule un refus d'autoriser une installation classée (IPCE) et accorde lui-même l'autorisation aux conditions qu'il fixe ou, le cas échéant, en renvoyant le bénéficiaire devant le préfet pour la fixation de ces conditions, la voie de la tierce opposition est ouverte contre cette décision. Afin de garantir le caractère effectif du droit au recours des tiers en matière d'environnement et eu égard aux effets sur les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement de la décision juridictionnelle délivrant une autorisation d'exploiter, la voie de la tierce opposition est, dans cette configuration particulière, ouverte aux tiers qui justifieraient d'un intérêt suffisant pour demander l'annulation de la décision administrative d'autorisation, sans qu'ils aient à justifier d'un droit lésé. Le tiers peut invoquer à l'appui de sa tierce opposition tout moyen. 2) En vue de garantir la sécurité juridique du bénéficiaire de l'autorisation, il est loisible au juge, lorsqu'il délivre une autorisation d'exploiter une installation classée, d'ordonner dans son jugement la mise en œuvre des mesures de publicité prévues par le I de l'article R. 512-39 du code de l'environnement. Le préfet peut également décider la mise en œuvre de ces mesures portant sur une autorisation délivrée par le juge administratif. Lorsque la publicité prescrite par le juge ou ordonnée par le préfet a été assurée, les tiers ne sont plus recevables à former tierce opposition au jugement après écoulement des délais prévus par les dispositions de l'article R. 514-3-1 du code de l'environnement.
Contentieux administratif/ Urbanisme, 10 juin 2015, n°386121 : L’intérêt à agir en contentieux de l’urbanisme impose, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien ; qu'il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité ; qu'il appartient ensuite au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci.