Avocat en urbanisme : Le point sur le droit à agir en droit de l'urbanisme

Depuis le 19 août 2103, le droit à agir contre les autorisations d’urbanisme est très encadré.

Le droit à agir en droit de l’urbanisme n’était déjà pas ouvert à tous.

Malgré ce caractère déjà restrictif du droit à agir en urbanisme, et à la demande des professionnels de la construction qui considéraient que trop de recours étaient abusifs, une ordonnance pour « lutter contre les recours abusifs en matière d’autorisations d’urbanisme » a été prise. Cette ordonnance est entrée en vigueur le 19 août 2013, y compris pour les litiges en cours.

Il a été inséré dans le livre VI du code de l'urbanisme, après l'article L. 600-1-1, les articles L. 600-1-2 et L. 600-1-3 ainsi rédigés :

« Art. L. 600-1-2. - Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation.
« Art. L. 600-1-3. - Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l'intérêt pour agir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager s'apprécie à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. »

Pour la Haute juridiction administrative, ces dispositions sont applicables aux demandes contre des décisions intervenus après la publication de la loi et donc à compter du 19 août.

Une Cour administrative d’appel avait eu a contrario la même interprétation.

Conseil d'État - N° 376113 – 18 juin 2014

L'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, créé par cette ordonnance, dispose que : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ". L'article L. 600-1-3 du même code, créé par la même ordonnance, dispose que : " Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l'intérêt pour agir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager s'apprécie à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire ". S'agissant de dispositions nouvelles qui affectent la substance du droit de former un recours pour excès de pouvoir contre une décision administrative, elles sont, en l'absence de dispositions contraires expresses, applicables aux recours formés contre les décisions intervenues après leur entrée en vigueur.

Cour Administrative d'Appel de Versailles - N° 12VE02165 – 22 mai 2014

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de l'ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 susvisée relative au contentieux de l'urbanisme, codifié à l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement (...) " ; que ces dispositions sont entrées en vigueur, conformément aux dispositions de l'article 5 de ladite ordonnance, un mois après sa publication au Journal officiel de la République française, soit le 19 août 2013 ; qu'en l'absence de dispositions expresses contraires, une disposition nouvelle qui affecte la substance du droit de former un recours pour excès de pouvoir contre une décision administrative n'est applicable qu'aux recours formés contre les décisions intervenues après son entrée en vigueur ;

Considérant que la maison de M. et Mme B...est située dans le voisinage immédiat de l'immeuble situé 20 rue Paul Déroulède d'où il est particulièrement visible ; que, dès lors, le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE SITUE 20 RUE PAUL DEROULEDE ET 23 AVENUE ALBERT A BOIS-COLOMBES justifie d'un intérêt lui donnant qualité à contester le permis en litige, délivré le 16 novembre 2009 ; que la fin de non-recevoir opposée par M. et MmeB..., qui ne sauraient valablement opposer les prescriptions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, lesquelles sont inapplicables aux recours pour excès de pouvoir formés contre les autorisations d'urbanisme délivrées antérieurement à leur date d'entrée en vigueur, ne peut ainsi qu'être écartée ;

Une telle entorse au droit d’ester en justice ne pouvait qu’être contestée dans sa conformité à la constitution française.

La Haute juridiction administrative a refusé de transmettre au Conseil constitutionnel une telle demande en considérant qu’elle ne présentait pas de caractère sérieux.

Conseil d'État - N° 380645  - 27 juin 2014

Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, créé par l'ordonnance du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l'urbanisme, laquelle a été ratifiée par le 4° du IV de l'article 172 de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation " ; Considérant que la Society of architects and developers soutient que les dispositions citées ci-dessus portent une atteinte substantielle au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction, tel qu'il est garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; que, toutefois, les décisions statuant sur les permis de construire, de démolir ou d'aménager, prises dans le cadre de la police spéciale de l'urbanisme, ont pour objet de contrôler que les projets en cause sont conformes aux règles d'urbanisme relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords ; que les dispositions contestées de l'article L. 600-1-2, définissant les conditions de recevabilité auxquelles sont soumis les recours dirigés contre les permis de construire, de démolir ou d'aménager, poursuivent un objectif d'intérêt général, consistant à prévenir le risque d'insécurité juridique auquel ces actes sont exposés ainsi que les contestations abusives ; qu'eu égard au champ d'application de ces dispositions, à la portée des décisions en cause et aux critères de recevabilité retenus, le moyen tiré de ce que ces dispositions porteraient atteinte aux garanties de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen en restreignant excessivement le droit au recours ne peut être regardé comme ayant un caractère sérieux ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la question de la conformité des dispositions contestées aux droits et libertés garantis par la Constitution, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; qu'il n'y a pas lieu, par suite, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

Le droit semble donc être définitivement arrêté. L’intérêt à agir dans le cadre de l’urbanisme règlementaire a été réduit comme peau de chagrin.

Le requérant devra démontrer que la construction, l'aménagement ou les travaux qu’il conteste sont de nature à affecter directement ses conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance.

En d’autres termes, le requérant devra démontrer un préjudice très direct.

Un premier arrêt d’une Cour d’appel considère que les conditions sont remplis lorsqu’une construction d’envergure doit être réalisée sur le terrain attenant à celui du requérant.

Cour Administrative d'Appel de Nancy - N° 13NC01599 – 3 avril 2014 

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan cadastral fourni par le pétitionnaire à l'appui de sa demande de permis de construire, que M. et MmeE..., M.D..., et M. B...et Mme A...sont respectivement propriétaires des parcelles cadastrées section AK n° 115, 190 et 1151, voisines du terrain d'assiette de la construction projetée, et sur lesquelles sont implantées leurs maisons d'habitation ; qu'ainsi, la construction objet du permis de construire en litige, d'une longueur de 20 m et d'une hauteur de 9 m, est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation de leurs biens ; que, dès lors, et à supposer même que les dispositions précitées puissent être regardées comme applicables à une instance introduite avant leur entrée en vigueur, les requérants justifient d'un intérêt pour agir contre ce permis de construire ; que la fin de non recevoir opposée par la société BZR Invest doit donc être écartée ;

Une autre cour a tiré de la seule proximité immédiate de la construction à édifier un élément suffisant pour donner un intérêt à agir.

Cour administrative d'appel de Lyon - N° 13LY01020 – 5 novembre 2013

Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la propriété de Mme B...est située à proximité immédiate de celle de M. et Mme A...; que les travaux en litige sont donc susceptibles d'en affecter directement les conditions d'occupation ; que, dès lors, Mme B...dispose d'un intérêt pour agir contre le permis contesté ; que, par suite, la fin de non recevoir opposée par les époux A...ne peut qu'être écartée ;

P COSSALTER, Avocat à la Cour

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